Auto-agression : «Les parents ne doivent pas détourner le regard».
Monsieur Schmid, combien de jeunes en Suisse présentent des comportements d'automutilation ?
ont un comportement violent ?
Nous avons étudié cette question dans le service de recherche en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent de l'UPK de Bâle . Il y a beaucoup de jeunes chez nous qui déclarent s'être déjà blessés eux-mêmes une fois. Environ 4,5 % l'ont fait au moins quatre fois au cours des six derniers mois. Dans les cliniques psychiatriques pour enfants et adolescents, ce chiffre atteint même 50 pour cent et 38 pour cent chez les jeunes vivant dans des groupes de vie socio-pédagogiques.
Quelle est la fonction de ce comportement ?
La cause la plus fréquente de l'automutilation est de mettre fin à des états de tension violents, à des sentiments désagréables ou de tourner en rond autour de pensées négatives et pesantes. Les états de tension violents s'accompagnent également d'une perte de sensations corporelles chez les personnes concernées. L'automutilation permet aux personnes concernées de se sentir à nouveau en sécurité et de se calmer.
On sait que les filles sont plus souvent touchées que les garçons. Quelle est la tranche d'âge la plus à risque ?
Les automutilations commencent généralement après la puberté et le plus souvent après les premières menstruations. Durant cette phase de la vie, des difficultés apparaissent souvent dans la régulation des émotions, la perception du corps et le schéma corporel propre se modifient. De plus, l'estime de soi est plus instable à ce stade du développement et les processus critiques d'estime de soi sont plus fréquents.
Le contact avec les jeunes du même âge est très important à cet âge. Le sentiment de rejet par d'autres personnes a été identifié dans plusieurs études comme un facteur déclenchant de l'automutilation. De plus, les adolescents et les jeunes adultes sont beaucoup plus vulnérables aux dynamiques de groupe.
En d'autres termes, certains apprennent le comportement d'automutilation des autres ?
Pour ainsi dire. Il est toutefois important de comprendre qu'aucun jeune ne s'automutile simplement parce que d'autres le font, mais que derrière cela se cachent des besoins très importants, comme celui d'appartenir à un groupe. Pour surmonter le comportement d'automutilation, il est bien plus efficace de mettre en évidence ces besoins et d'y répondre.
Les jeunes concernés s'automutilent pour mettre fin à des états de tension violents, à des sentiments désagréables ou à tourner en rond autour de pensées négatives et pesantes.
Quels sont les facteurs qui conduisent à une augmentation de l'automutilation ?
Les facteurs de risque sont le stress familial, les expériences de vie pénibles, le manque de contacts sociaux en classe. Les facteurs qui protègent en revanche contre les comportements d'automutilation sont une bonne intégration sociale, des activités de loisirs positives, notamment l'intégration dans des clubs de sport ou des groupes de musique. Tous ces éléments semblent être des facteurs protecteurs. Une bonne estime de soi et un sentiment d'efficacité personnelle élevé, c'est-à-dire la croyance en la possibilité de résoudre des problèmes, vont également de pair avec un risque réduit d'automutilation.
Comment puis-je savoir, en tant que mère ou père, si mon enfant est en danger ?
Les parents devraient s'inquiéter si leur enfant s'isole beaucoup, semble souvent déprimé et irritable, perd son intérêt pour les loisirs, se retire de ses amis et évite ses parents. Il convient d'écouter attentivement s'il se dévalorise et s'exprime négativement de manière répétée. Il est bien sûr aussi très frappant de voir des adolescents ne porter que des vêtements à manches longues en plein été et éviter que l'on voie leurs jambes et leurs bras, par exemple en ne se baignant plus.
Comment les parents doivent-ils réagir s'ils observent ce comportement ou même s'ils découvrent des blessures chez leur enfant ?
Il est très important de ne pas détourner le regard et de ne surtout pas faire semblant de ne rien remarquer. Il est également important de ne pas faire de reproches à l'enfant, mais d'exprimer son inquiétude, de s'accrocher, de faire une offre de relation et de la maintenir, même si la personne concernée ne peut pas l'accepter immédiatement.
En revanche, ranger des objets dangereux comme des couteaux ou des ciseaux n'est pas très prometteur. Les jeunes concernés trouvent toujours quelque chose avec lequel ils peuvent se blesser s'ils le veulent vraiment. Il est de loin préférable de conclure des accords contraignants avec le ou la concerné(e) sur ce que l'on peut faire lorsque la tension et la pression des scarifications augmentent, et de proposer de l'aide.
Quand dois-je, en tant que mère ou père, faire appel à une aide professionnelle ? Quelle forme pourrait prendre cette aide ?
Il est certainement bon de motiver les jeunes qui se sont blessés eux-mêmes plus d'une fois à accepter une aide professionnelle. Il est judicieux de souligner, lors de cet entretien, que l'on est inquiet et que l'on souhaite qu'il reçoive de l'aide et que l'on accompagne la recherche d'aide avec la présence nécessaire, également en tant que parents.
Toutes les thérapies réussies, quelle que soit l'école thérapeutique, ont en commun de s'attaquer à l'auto-perception des sentiments et des modèles d'interaction et d'aider les adolescents à mieux percevoir leurs sentiments et leurs besoins et à mieux s'exprimer, même dans des interactions sociales difficiles.
Plus d'infos
- Intervention mobile auprès des jeunes : www.zh.ch/intervention-jugendkrisen
Trouver des thérapeutes et des psychiatres appropriés :
- Portail des thérapeutes Sanasearch.ch : www.sanasearch.ch
- Fédération suisse des psychologues (FSP) : www.psychologie.ch
- Association suisse des psychothérapeutes (ASP) : www.psychotherapie.ch
- Société suisse de psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents (SSPPEA) : www.sgkjpp.ch
Vous trouverez l'article principal sur l'interview ici.