Que faire de l'ami imaginaire de l'enfant ?
Une ficelle en feutre se balance au vestiaire du jardin d'enfants. C'est la laisse. Noah l'a nouée là pour son renard. Pendant que le petit garçon de quatre ans joue, bricole et fait de la gymnastique, le renard est assis dans le vestiaire et attend. Quand Noah rentre à la maison, il enfile ses chaussures et sa veste et prend la corde en feutre dans sa main. Pendant qu'il rentre à pied, il la tire derrière lui. Personne d'autre que lui ne peut voir le renard.
L'animal a été son premier compagnon invisible. «Il accompagnait Noah partout», raconte Katrin, sa mère. Le renard était également souvent présent lors des repas - sous la table, où Noah prenait alors son goûter. «Plus tard, il y avait une chose semblable à un homme», se souvient sa maman. «C'était le petit Nick. Il pouvait voler jusqu'au plafond de la chambre». Mais le plus imposant des amis imaginaires de Noah était un dragon de feu doré de la taille d'un avion de taille moyenne, qui a accompagné la famille jusqu'en vacances.
Un enfant sur trois a un ami imaginaire
Entre-temps, Noah a huit ans et va à l'école. Ses amis imaginaires ont disparu il y a deux ans déjà, à la fin de l'école maternelle. Il n'avait plus besoin d'eux. «Les compagnons imaginaires aident les enfants à se sentir moins seuls», explique Michael Schulte-Markwort, directeur du service de psychiatrie pour enfants et adolescents à la clinique universitaire de Hambourg-Eppendorf. «Ils apparaissent lorsqu'un enfant doit sortir pour la première fois dans le monde et se séparer de sa maman».
Les spécialistes parlent également d'objets transitionnels - des objets tels qu'un doudou ou des peluches qui donnent à l'enfant un sentiment de sécurité et de soutien. «Tous les enfants ont besoin de tels objets de transition», explique Schulte-Markwort.
Les compagnons invisibles peuvent se présenter sous les formes les plus diverses.
Alors que certains se débrouillent avec un animal en peluche, d'autres s'inventent des compagnons imaginaires. Ceux-ci peuvent avoir une forme humaine ou être des animaux ou des créatures fabuleuses. De nombreux garçons et filles ont parlé de leurs compagnons invisibles au pédopsychiatre Schulte-Markwort, âgé de 60 ans.
«Environ un enfant sur trois a de temps en temps une amitié qui n'existe que dans son imagination», déclare également Inge Seiffge-Krenke de l'université de Mayence. Jusque dans les années 1970, les scientifiques craignaient que les compagnons imaginaires ne soient des signes avant-coureurs de troubles psychiques. Aujourd'hui, on sait que le phénomène n'est pas pathologique. «Ce sont des enfants tout à fait normaux et en bonne santé», explique Seiffge-Krenke. «Les amis invisibles sont une réalisation créative qui aide l'enfant dans des situations difficiles et favorise son développement».
Enfants uniques solitaires
Des compagnons imaginaires peuvent apparaître lorsque les parents se séparent, par exemple, mais aussi lorsqu'un frère ou une sœur naît. C'est ce qui est arrivé à Noé, âgé de trois ans, lorsque son petit frère est venu au monde.
La chercheuse américaine Marjorie Taylor de l'Université de l'Oregon a interrogé 152 enfants pour une étude et a constaté que les enfants qui s'inventent des amis n'ont généralement pas de frères et sœurs ou sont des premiers-nés. Les deux se sentent apparemment souvent seuls : les enfants uniques parce qu'il leur manque un compagnon de jeu, et les premiers-nés parce que le nouveau frère ou la nouvelle sœur attire l'attention des parents.
Les enfants âgés de trois à sept ans ont particulièrement souvent des amis invisibles. Ce moment s'explique par le développement des enfants. «C'est une sorte de jeu cognitif», explique la psychologue Seiffge-Krenke, «et donc une question de maturité intellectuelle». Les enfants apprennent également beaucoup pour eux-mêmes en échangeant avec ces amis imaginaires, poursuit Seiffge-Krenke. Cela favorise les compétences sociales.
Un alien armé pour nous protéger ?
Lorsque des renards et d'autres camarades rejoignent la famille, les parents peuvent donc rester sereins. Néanmoins, les parents devraient accorder une attention particulière à cet hôte invisible. Un compagnon invisible en dit long sur l'état d'esprit de l'enfant.
«Je souhaite que les mères et les pères ne considèrent pas cela comme une fantaisie», déclare le pédopsychiatre Schulte-Markwort. «Ils devraient être attentifs et développer eux-mêmes une hypothèse sur la raison pour laquelle le compagnon pourrait être nécessaire à l'enfant à ce moment précis». Plus les parents accordent de place à l'ami imaginaire, plus vite celui-ci perd de son importance, ajoute-t-il.
La plupart du temps, les amis imaginaires disparaissent d'eux-mêmes.
Mais si un compagnon imaginaire reste aux côtés d'un enfant pendant des années, les parents devraient en chercher la raison avec l'aide de spécialistes. C'est le cas de ce garçon de huit ans dont Schulte-Markwort se souvient encore.
«Il avait un alien», raconte le pédopsychiatre. «Ce compagnon armé n'était menaçant que pour les autres et protégeait le garçon du monde hostile». Comme l'alien ne disparaissait absolument pas, les parents sont venus le voir en consultation avec leur fils. «Le garçon avait un peu de mal à accepter la réalité», explique Markwort-Schulte. Une thérapie de groupe a aidé. «Plus le garçon prenait de l'assurance au contact de ses pairs, moins il avait besoin de l'alien».
Les compagnons imaginaires sont rarement aussi tenaces. La plupart du temps, les renards invisibles et les amis volants disparaissent d'eux-mêmes. Le jeune frère de Noah n'a d'ailleurs pas de protecteurs invisibles. «C'est presque un peu dommage», dit sa maman. «D'une certaine manière, ces êtres étaient aussi charmants».
