L'arbitre intérieur est de bon conseil
Ce n'est que récemment que j'ai assumé la surveillance de la récréation pour une collègue. Dans l'école en question, située dans l'Emmental, une centaine d'élèves de la première à la neuvième classe se partagent la cour de récréation. La tâche de surveillance des récréations est donc assumée par deux enseignants.
Comme les pauses font partie du temps d'enseignement, les élèves sont soumis à la garde et au pouvoir de direction de l'école. En raison de leur mission professionnelle, les enseignants sont donc tenus de surveiller les récréations. D'un point de vue purement juridique, elle fait donc partie du temps de travail et est rémunérée dans le cadre du temps de travail annuel fixé.
Plus un conflit s'envenime, plus il est difficile de le résoudre. Il est bien plus facile d'éviter un conflit de manière préventive.
Lorsque les enfants et les adolescents se côtoient pacifiquement pendant la pause, l'enseignant peut même profiter du beau temps et de l'air frais pendant la surveillance. Dans de tels moments, il est facile d'oublier le café que l'on a manqué.
Mais la surveillance peut aussi s'avérer mouvementée et très exigeante. Lorsque deux enfants se disputent en même temps, qu'il faut soigner un genou éraflé et qu'un enfant ne respecte pas les règles sur le terrain de football, on a du pain sur la planche. Mais les pauses les plus passionnantes arrivent généralement avec la première neige.
Conflit dans le bac à sable
Revenons à ma surveillance de la récréation. Il est un peu moins de dix heures. Je suis arrivé un peu plus tôt dans la cour de récréation. Le triple son de la «cloche» électronique retentit à 9h55 précises. Peu de temps après, les premiers enfants sortent de l'école avec leur goûter.
Plus les enfants entrent sur la place, plus l'activité devient bruyante et animée. L'ambiance de cette journée est paisible. Je flâne dans la cour de récréation, j'échange avec ma collègue et j'observe ce qui se passe.
Deux filles ont commencé deux projets de construction dans le bac à sable, indépendamment l'une de l'autre. Alors que l'une des filles est occupée à accumuler une énorme colline, l'autre s'approche pour construire un long fossé.
Un peu plus tard, le tas de sable de la camarade de classe semble gêner la poursuite de la tranchée, et une partie de la colline est alors rapidement enlevée. Sa collègue s'en aperçoit également et la tranchée est rebouchée. Je vois le conflit qui se dessine et m'approche lentement. Les premières paroles méchantes sont déjà prononcées et peu après, les premières larmes coulent.
Si les enfants sont perçus dans leurs besoins, ils collaborent mieux et sont prêts à faire preuve d'égards.
J'essaie de jouer le rôle de médiateur et de calmer les esprits dans un premier temps. Les deux filles peuvent s'exprimer l'une après l'autre sur la situation controversée. Elles s'écoutent mutuellement de manière exemplaire. Au lieu de les blâmer ou de leur présenter des solutions, je les encourage ensuite à faire leurs propres propositions.
Ils se mettent d'accord pour délimiter une frontière dans le sable et ne plus la franchir à partir de maintenant. Je suis impressionné par cette solution aussi banale qu'ingénieuse. Je n'aurais pas pu mieux résoudre le conflit. En respectant la limite, la paix tient effectivement jusqu'à la fin de la grande pause.
Les compétences sociales ont un effet préventif
Même si le conflit que nous venons de décrire était relativement anodin et facile à résoudre, il montre de manière exemplaire où se situe généralement l'élément déclencheur : Les conflits commencent souvent par le franchissement d'une limite.
Les transgressions peuvent se manifester de diverses manières. Les insultes en font partie, tout comme les agressions physiques ou le non-respect des droits de propriété. Quelle que soit la forme sous laquelle une limite a été franchie, la transgression constitue dans tous les cas une atteinte à l'intégrité.
Souvent, cela déclenche une réaction qui conduit à une dynamique difficilement prévisible. Plus un conflit s'envenime, plus il est difficile de le résoudre. Il est bien plus facile d'éviter un conflit de manière préventive.
Pour éviter un conflit, il faut donc respecter les limites de nos semblables. Pour éviter de franchir les limites, il faut donc des compétences sociales. L'empathie permet de reconnaître à temps les limites de l'autre. Et le respect de cette limite peut étouffer une escalade dans l'œuf.
La réussite de l'apprentissage n'est possible que si les enfants sont libres de tout conflit.
Dans le langage de la prévention de la violence, nous parlons dans notre école d'un arbitre intérieur. Cet arbitre reconnaît les limites de l'autre et lui rappelle de ne pas les dépasser. Contrairement à l'arbitre tel que nous le connaissons dans le sport, l'arbitre intérieur correspond à notre propre raison, dont nous ne remettons pas non plus le jugement en question.
Si, malgré tout, les limites sont franchies, il existe des stratégies et des instruments utiles pour résoudre les conflits, comme par exemple l'escalier de la paix. Des services spécialisés aident les écoles à élaborer et à mettre en œuvre des concepts de prévention et de gestion.
Lors des formations continues, des cas concrets sont discutés et des solutions sont envisagées. Les enseignants apprennent des jeux et des exercices qu'ils peuvent intégrer dans leurs cours. Ils sont ainsi en mesure d'aider les élèves à acquérir les compétences sociales nécessaires à une cohabitation pacifique et compréhensive.
Le programme scolaire nomme ces compétences : capacité à dialoguer et à coopérer, à gérer les conflits et la diversité. Cet investissement en vaut la peine. En effet, un quotidien scolaire bien réglé et des apprentissages réussis ne sont possibles que si les enfants et les jeunes ne sont pas en conflit. Si le bien-être est au rendez-vous et si les enfants sont perçus dans leurs besoins, ils collaborent mieux et sont prêts à faire preuve d'égards.
Ces stratégies nous aident également dans notre vie d'adulte. Si nous sommes conscients de notre rôle de modèle, nous devrions également écouter notre arbitre intérieur et respecter aussi bien nos propres limites que celles de notre entourage. Une culture de la dispute réussie implique de résoudre les conflits avec considération et compréhension. C'est un engagement que nous devrions prendre.