Qu'est-ce que le respect et comment le vivons-nous ?

Connaissez-vous le film «Le Cercle des Poètes Disparus», qui a fait sensation il y a 35 ans ? Il raconte l'histoire d'un groupe d'élèves d'un pensionnat de garçons conservateur dans l'État américain du Vermont. Le parcours des élèves est influencé de manière décisive par l'arrivée dans leur vie du charismatique professeur d'anglais John Keating (joué par Robin Williams). Keating ne se contente pas d'enseigner la littérature à ses élèves, mais les inspire à organiser leur vie selon la devise «Carpe diem» - «Profite du jour présent».

Dans la scène clé, les élèves montent sur leurs tables et crient «Ô Capitaine ! Mon capitaine !». Ce geste symbolise leur profond respect et leur estime pour leur professeur, qui les a inspirés à suivre leur propre voie, à poursuivre leurs rêves, à penser de manière indépendante et à remettre en question de manière critique les normes sociales traditionnelles. Il illustre la manière dont le respect et la reconnaissance véritables peuvent changer la vie et les perspectives des gens.

Le respect de soi-même et des autres est au cœur de notre vie en société.

Un besoin humain fondamental

Le mot «respect» signifie à l'origine «regard en arrière, contemplation». Le préfixe «re» (revenir) et «specere» (regarder) conduisent à un besoin fondamental essentiel de l'être humain : être vu. Le respect de soi-même et des autres est au cœur de notre vie en société et renforce la santé mentale.

Le respect est plus qu'une simple politesse - c'est la base d'une véritable connexion et croissance humaines. Le respect est une attitude humaine fondamentale qui s'exprime par l'appréciation, le respect et la reconnaissance d'autres personnes, de la nature ou des institutions. Cette attitude se manifeste dans notre comportement et nos paroles, en traitant les autres avec politesse, tolérance et reconnaissance.

Le respect a un impact profond sur les interactions sociales et le bien-être individuel. Lorsque les gens se sentent respectés, cela renforce leur estime de soi et favorise une image positive d'eux-mêmes.

Des interactions respectueuses créent un environnement de confiance et de sécurité dans lequel les personnes peuvent s'exprimer et s'épanouir librement. Cela conduit à une société harmonieuse et coopérative, dans laquelle les conflits peuvent être résolus de manière constructive. De plus, le respect favorise la responsabilité sociale et l'engagement, car les personnes qui se sentent respectées sont plus enclines à s'engager pour le bien commun.

Le respect est devenu une denrée rare.

René Borbonus, expert en communication

Deux formes fondamentales de respect

La littérature spécialisée ne propose pas de définition uniforme du terme «respect». Toutefois, le groupe de recherche interdisciplinaire Respect Research Group de l'université de Hambourg distingue deux formes de base : le respect horizontal et le respect vertical.

• Le respect horizontal signifie que tous les individus sont égaux et reconnus, indépendamment de leur origine, de leur rang ou de leur statut. Il est le fondement d'une cohabitation démocratique et repose sur des valeurs et des principes individuels.
• Le respect vertical , quant à lui, décrit la reconnaissance qu'une personne reçoit pour son expertise ou ses performances particulières. Cette forme de respect est hiérarchique et s'exprime par la reconnaissance sociale, mais ne peut pas être apprise ou réclamée.

Il est temps de se renseigner auprès d'un spécialiste. René Borbonus est expert en communication respectueuse et auteur de best-sellers. Il utilise les connaissances de l'université de Hambourg pour promouvoir, avec ses collaborateurs scientifiques, les relations respectueuses dans la société.

Monsieur Borbonus, le respect est-il une valeur ou une attitude ?

De mon point de vue, c'est les deux. En premier lieu, le respect est une valeur. Si j'adopte cette valeur pour moi-même, il en résulte une attitude. Et de cette attitude naît un comportement qui peut régler une cohabitation harmonieuse.

Propos désobligeants, invectives, insultes : Que ce soit en politique, dans les entreprises ou dans la cour de récréation, le thème du respect est omniprésent. Pourquoi ?

Parce que nous ressentons tous en ce moment ce que cela fait de ne pas en avoir assez. L'irritabilité générale et le besoin de se retirer des discussions en sont des signes évidents. Le ton rude des débats, des médias sociaux, des écoles, de la politique et même du cercle d'amis montre que les relations respectueuses sont devenues une denrée rare. La multitude de conflits et de défis pèsent sur nos relations, attisent l'égoïsme et augmentent en même temps la nostalgie de la politesse et de l'estime.

La notion de respect évolue-t-elle avec l'âge ?

Ma conviction est que la compréhension fondamentale du respect - à savoir la capacité à percevoir et à reconnaître les autres, indépendamment de leur origine, de leur profession ou de leur titre - ne change pas au cours de la vie. Ce qui change, en revanche, c'est la manière dont nous vivons et exprimons le respect.

Pourquoi certaines personnes ont-elles du mal à être respectueuses ?

Je pense que la plupart des manquements au respect ne sont pas conscients. Les gens font souvent preuve d'inattention par inadvertance. Nos relations interpersonnelles sont façonnées par la communication, et de nombreux facteurs sont nécessaires à un échange respectueux. Une autre raison du manque de respect est notre émotivité. Lorsque nous devenons émotifs, notre capacité à nous contrôler est réduite.

Dans ces moments-là, il est difficile d'argumenter de manière intelligente, calme et nuancée. Les émotions rendent difficile le maintien d'une attitude respectueuse. De plus, la manière dont on nous a montré l'exemple du respect et l'influence des médias sur nous jouent un rôle.

Quel est le rôle du respect dans l'éducation et le développement modernes des enfants ?

Il est de notre devoir d'apprendre à un enfant, au cours de ses premières années de vie, ce que signifie le respect de soi et des autres. Je pense que l'empathie et l'écoute attentive sont des éléments essentiels du respect, souvent sous-estimés par les parents. Si nous voulons donner aux enfants les moyens d'agir avec respect, l'empathie est la clé. Cela commence déjà par la minimisation des expériences vécues par nos enfants. Nous répondons souvent par des phrases telles que «Ce n'est pas si grave ! Tu vas y arriver». Cela part certes d'une bonne intention, mais nous ne reconnaissons pas correctement les besoins de l'enfant. Au fond, balayer ainsi les sentiments est déjà un acte d'irrespect.

Chacun d'entre nous peut faire quelque chose contre le discours de haine, le harcèlement ou la désinformation.

René Borbonus, expert en communication

Il y a deux ans, une étude de la Fondation Mercator Suisse a demandé à 7700 personnes ce que les enfants devraient retenir de l'école pour la vie. 78% des personnes interrogées ont répondu : le respect et la tolérance. La performance et la discipline arrivaient en deuxième position. Que pensez-vous de ce résultat ?

De mon point de vue, la clé de toutes les compétences est la compréhension de texte. Sans les capacités de lire, d'écrire et de comprendre, je ne serais moi-même pas en mesure d'élargir mon savoir et mes connaissances. La lecture et l'écriture permettent d'accéder au savoir et à la connaissance, c'est pourquoi elles occupent pour moi la première place. Il serait toutefois important de compléter ces unités d'apprentissage par des éléments de formation humanistes tels que le respect et la tolérance. Cependant, je ne vois aucune raison de remettre en question l'ensemble du règlement de l'école pour cette raison.

Nous évoluons de plus en plus souvent dans l'espace virtuel. Comment réussir à se comporter de manière respectueuse sur les réseaux sociaux ?

Je suis d'avis que l'espace virtuel est meilleur que ce que nous pensons souvent. Moi aussi, je me surprends à le présenter sous un jour trop défavorable. Fondamentalement, nous sommes confrontés à trois problèmes principaux : le discours de haine, la désinformation et les théories du complot. Celles-ci contribuent à durcir le ton, à nuire à la communication virtuelle et à exposer les gens à des dangers. Ce que je souhaite, c'est une remise en culture de l'espace virtuel, car c'est un lieu que nous habitons et continuerons d'habiter. Nos enfants s'y informent et s'y orientent. Il est donc de notre devoir de considérer cet espace avec attention et de ne pas nous retirer lorsque cela devient fatigant.

Chacun d'entre nous peut faire quelque chose contre le discours de haine, le harcèlement ou la désinformation, même si cela est désagréable et que nous subissons des revers. Autrefois, les adultes intervenaient immédiatement lorsqu'il y avait des problèmes dans les lieux de rencontre pour jeunes, par exemple. Ils prenaient les personnes concernées à part et tentaient de résoudre le problème par la communication. Aujourd'hui, l'espace virtuel est un de ces lieux de rencontre où nos enfants passent beaucoup de temps. Nous devons donc le prendre très au sérieux, intervenir si nécessaire et apprendre à nos enfants à se comporter de manière respectueuse.

Que conseillez-vous aux parents ?

La participation et un intérêt réel sont essentiels. Visitez ces plateformes, engagez un dialogue ouvert avec votre enfant sur ses activités sociales. Écoutez attentivement votre enfant de manière empathique. Donnez-lui le sentiment que vous prenez ses préoccupations au sérieux. Les enfants ont besoin de savoir qu'ils ne sont pas seuls face aux dangers qui les guettent dans le monde virtuel. Soyez courageux et intervenez pour garantir une cohabitation respectueuse dans l'univers numérique.

Faut-il avoir du respect pour soi-même pour pouvoir respecter les autres ?

Oui, absolument. Je considère le respect comme un art universel, un peu comme Erich Fromm décrit l'amour. Fromm est convaincu que la capacité à s'aimer soi-même est une condition préalable pour pouvoir vraiment aimer les autres. Il en va de même pour le respect. Ce n'est qu'en se respectant soi-même que l'on peut créer les bases nécessaires pour reconnaître les autres comme ses égaux. Si l'on ne se respecte pas soi-même, le respect des autres sera, à mon avis, compromis. C'est pourquoi il est important de renforcer le respect de soi de nos enfants dès leur plus jeune âge.

Nous aspirons tous à la considération et à l'estime. Le manque de respect actuel est perceptible dans de nombreux domaines de notre vie. Ce qui commence à la maison se poursuit en classe, dans les salles de réunion, sur les médias sociaux et enfin dans les débats politiques. Le manque de respect entraîne une perte de confiance et rend difficile la cohabitation et le développement à tous les niveaux.

Le respect commence par nous-mêmes. La manière dont nous nous respectons nous-mêmes façonne notre attitude et favorise une culture de l'estime et de l'égalité.