Qu'est-ce qui vient en premier, la motivation ou le succès?
Comment définiriez-vous la motivation ?
TuongVan Vu : C'est plus difficile qu'on ne le pense. Dans les années 1980, il existait déjà plus de 100 définitions de la motivation. Si la définition varie selon les théories, nous définissons la motivation comme l'état qui motive notre comportement. Nos recherches se concentrent en particulier sur le comportement d'apprentissage.

La motivation change-t-elle lors du passage de l'apprentissage enfant à l'apprentissage adulte ?
Martijn Meeter : Dans la plupart des pays, les jeunes enfants sont très motivés lorsqu'ils entrent à l'école. Mais au fil des ans, leur motivation diminue progressivement. Chaque changement, comme le passage de l'école primaire à l'école secondaire, donne un petit coup de pouce à la motivation. L'illusion se crée que « tout va s'améliorer et que l'école ne sera plus ennuyeuse ». Mais au lieu de cela, la tendance continue à se dégrader.

De plus, l'effet des performances antérieures s'accentue considérablement avec l'âge. Les jeunes enfants ne se soucient pas de leur classement et ne savent généralement pas où ils se situent par rapport aux autres élèves. Ils savent seulement qu'ils sont plus performants qu'auparavant, ce qui leur donne le sentiment d'être plutôt bons.
Vers le milieu de l'école primaire, ils commencent à se mesurer à leurs camarades. S'ils obtiennent de bons résultats, ils se sentent bien et cela les motive. S'ils obtiennent de moins bons résultats, ils peuvent avoir l'impression de devoir se forcer à faire quelque chose dans lequel ils ne sont pas bons. Plus les élèves sont âgés, plus le lien entre les performances antérieures et la motivation est fort.
Plus on se considère comme doué pour apprendre, mieux on apprend.
TuongVan Vu
La motivation augmente-t-elle les performances ou est-ce l'inverse ?
Vu : La motivation influence la performance, mais la performance influence également la motivation. Avec le temps, une boucle de rétroaction se crée. La question est : où commence-t-elle ? De notre point de vue, ce sont des influences externes telles que la qualité de l'enseignement, la pression extérieure ainsi que des influences culturelles et sociales qui alimentent cette boucle.
Je trouve très intéressante l'idée que l'image que l'on a de soi-même influence les résultats scolaires. Cela signifie que plus on se considère comme bon élève, mieux on apprend. C'est presque magique : comme on se considère comme un bon élève, on devient effectivement meilleur.
Il existe deux voies fondamentalement différentes qui mènent de la motivation à la performance. La première repose sur l'estime de soi et l'efficacité personnelle. Ce que vous pensez de vous-même détermine vos actions. Si vous pensez que vous êtes doué pour apprendre, vous fournirez davantage d'efforts, car cela correspond à vos attentes envers vous-même.
La deuxième voie passe par la valeur en tant que facteur de motivation. Comme vous reconnaissez la valeur de l'apprentissage, celui-ci devient plus agréable et vous vous investissez davantage.
Lorsque le système scolaire détermine principalement le temps consacré à l'apprentissage, la motivation joue un rôle moins important.
Martijn Meeter
Quel rôle joue la culture ?
Meeter : L'apprentissage comporte sans doute une composante culturelle très importante, mais nous ne la connaissons pas vraiment, car pratiquement toutes les études sur la motivation ont été menées dans des pays dits « WEIRD ». WEIRD est l'acronyme de « western, educated, industrialized, wealthy and democratic » (occidental, éduqué, industrialisé, riche et démocratique).
Dans certaines cultures et à certains niveaux, les enfants peuvent décider très librement du nombre d'heures qu'ils consacrent à leurs devoirs scolaires. La motivation est alors importante. Lorsque c'est principalement le système scolaire qui détermine le temps consacré à l'apprentissage, la motivation joue un rôle moins important.
Nous avons découvert que la motivation n'est pas un facteur déterminant dans la réussite scolaire. D'autres facteurs, tels que le milieu social, les gènes, la qualité de l'école ou la pression parentale, ont probablement plus d'influence sur l'apprentissage que la motivation.
Comment les chercheurs étudient-ils la motivation ?
Vu : La motivation fait l'objet de recherches depuis 30 ans. Au début, les chercheurs utilisaient principalement des données transversales. Cette méthode était sujette à erreur, car les enfants sont tous très différents. Aujourd'hui, on observe une transition vers des études longitudinales, dans lesquelles un groupe d'élèves est suivi pendant plusieurs années.
Les chercheurs ont cherché des moyens plus créatifs d'étudier la motivation. Il s'agit notamment d'une application mobile permettant de recueillir des expériences ou d'un environnement virtuel tel que Maths Garden, qui permet d'observer la motivation en temps réel sans interrompre l'activité d'apprentissage.
Nous pensons que la motivation est une partie essentielle de la personnalité, mais nous reconnaissons également que la structure scolaire et l'environnement sont également des facteurs de motivation importants.
TuongVan Vu
Une autre modification réside dans le fait que les mesures physiologiques font aujourd'hui l'objet d'une attention accrue. Les chercheurs peuvent mesurer l'activité électrique du cerveau ou la variabilité du rythme cardiaque afin de déterminer dans quelle mesure une personne se concentre sur une tâche d'apprentissage donnée ou l'effort qu'elle fournit. Cette approche recèle un grand potentiel pour la recherche future. Cependant, sa validation nécessite encore beaucoup de travail afin de prouver que les résultats fournissent réellement de nouvelles informations sur la motivation.
Quel est l'avenir de cette recherche ?
Vu : Les chercheurs se sont intéressés à la motivation au niveau individuel, mais commencent désormais à prendre en compte le contexte. Nous pensons que la motivation est une partie essentielle de la personnalité, mais nous reconnaissons également que la structure scolaire et l'environnement sont également des facteurs de motivation importants. Les recherches futures devraient absolument explorer ce domaine.
BOLD
Des chercheuses de pointe et de jeunes scientifiques partagent leur expertise et discutent avec un public avide de connaissances sur la manière dont les enfants et les jeunes se développent et s'épanouissent au XXIe siècle, sur les difficultés auxquelles ils sont confrontés, sur leurs modes de jeu et sur leur utilisation des technologies.