Paradoxe des temps dans le lockdown

Avec ce texte, Michèle Binswanger lance un mamagblog Lockdown, dans lequel elle raconte son expérience du home office.

Il est étrange de constater à quel point le temps s'écoule différemment lorsque l'on ne se précipite plus le matin de la maison au bureau, que l'on tient des réunions, que l'on reste assis au bureau, que l'on déjeune avec des collègues, que l'on s'offre peut-être une bière le soir ou que l'on fait encore du sport, puis que l'on se fraye un chemin à travers les flux de pendulaires pour rentrer chez soi.

Maintenant, nous restons à la maison et faisons tout d'ici. Au début, je pensais : "Oui, plus de trajets, cela signifie tellement plus de temps ! Mais non. Je n'ai pas plus de temps, mais il s'écoule différemment. Sans forme, il s'écoule à une vitesse folle et semble pourtant s'arrêter, on tourne en rond, on ne voit partout que des tâches à accomplir, on ne peut pas s'y mettre, d'autres choses sont plus importantes à ce moment-là. Les jours, autrefois connus sous les noms de lundi, mardi et mercredi, sont devenus indiscernables.

Les jours, autrefois connus sous le nom de lundi, mardi, mercredi, sont devenus indiscernables et sommes-nous encore en mars ou avons-nous déjà échoué le mois prochain ?

Je me souviens d'un livre de mon enfance. En fait, il ne s'agissait que du titre : «Deux ans de vacances», et j'ai dû parler avec trop d'enthousiasme à mon oncle philosophe de la façon dont j'imaginais que ce serait génial d'avoir deux ans de vacances. Il m'a écouté et a fait cette tête, comme s'il cherchait une réponse quelque part dans sa tête. Il m'a ensuite expliqué que nous apprécions tellement les vacances, surtout pour nous changer les idées et nous reposer. Mais que s'il n'y avait plus que des vacances, c'était une toute autre histoire, qu'il fallait se donner des structures bien à soi.

Mes enfants ont beaucoup de sympathie pour cette perspective : se coller le reste de l'année scolaire à la jambe - ce ne sont pas exactement des vacances, mais ils peuvent poursuivre leur éducation eux-mêmes jusqu'à nouvel ordre, sans cours, sans temps de présence, sans pression permanente. C'est comme si la crise avait appuyé sur un bouton d'arrêt, tout retient son souffle, tout fonctionne au ralenti. Et ce n'est pas seulement mauvais. Il y a aussi de la place pour la nouveauté. Curieusement, les hôpitaux le remarquent aussi, m'a dit une médecin.

C'est la perspective du journaliste qui s'enivre du vent des grands changements. Pour autant qu'on ne se chie pas dessus de peur.

Et puis, il y a une autre perspective. L'idée que les choses ne seront plus jamais comme avant, que tant de choses vont changer, a aussi quelque chose d'excitant. En tant que journaliste, je veux voir, comprendre, être là. C'est la perspective du reporter qui s'enivre du vent des grands changements. Pour autant qu'on ne se chie pas dessus de peur.

Un jour, le plus gros sera passé. Le temps reprendra son ancienne forme et nous nous apercevrons un jour que ce n'est pas l'ancienne forme. Mais une nouvelle. Je m'en réjouis déjà.


Voici le premier texte du nouveau mamagblog Lockdown de Michèle Binswanger, dans lequel elle raconte ses expériences au home office. Dès maintenant, cette mère de deux enfants blogue deux fois par semaine - le dimanche et le jeudi. Son blog apparaît sur www.tagesanzeiger.ch et www.fritzundfraenzi.ch.


Michéle Binswanger est philosophe de formation, journaliste, auteur de livres et chroniqueuse de longue date chez Fritz+Fränzi. Elle écrit sur des sujets de société, est mère de deux enfants et vit à Bâle.


Le journal de Michèle Binswanger en un coup d'œil :

  1. Zeiten-Paradox im Lockdown
  2. Ausgehungert nach Freunden
  3. Lockdown-Bilanz und eine Prise Optimismus
  4. Frühling und die Kunst, traurig zu sein

Lire la suite de Michèle Binswanger :

  • Guerilla-Erziehung
    Unsere Kolumnistin Michèle Binswanger lernt, ihren Kindern Widerstand zu leisten.
  • Der leise Neid auf pubertierende Teenies
    «Was macht die Pubertät mit meinem Kind?», fragt sich Michèle Binswanger. 
  • Kinderlose argumentieren falsch
    Fans von Kinderlosigkeit beschreiben ihr Leben ohne Nachwuchs so, als würden sie auf Zucker oder Alkohol verzichten. Sie argumentieren am Kern der Sache vorbei, findet Michèle Binswanger.