Natif numérique versus naïf numérique
De mon temps, être privé de sortie était la punition suprême. En colère, je devais rester dans ma chambre, isolé du monde extérieur et sachant que mes camarades étaient en train de jouer au football et de s'amuser.
Aujourd'hui, la punition maximale s'appelle «interdiction du portable». C'est la forme moderne de l'assignation à résidence, car les contacts sociaux, qui se font en grande partie via le téléphone portable, disparaissent d'un coup. Pas de Facebook, pas d'Instagram, pas de Snapchat, pas de WhatsApp, bref, aucun contact avec le monde et donc l'apocalypse pour un jeune.
J'applique volontiers l'interdiction du téléphone portable à mes filles, car je considère qu'il s'agit d'une mesure éducative et efficace, avec laquelle elles sont vraiment punies.
J'ai l'impression que de nombreux jeunes sont bien plus doués que nous, les adultes, en ce qui concerne les téléphones portables. Ils grandissent avec, pour ainsi dire. En allemand moderne, on les qualifie volontiers de «digital native», alors que «digital naiv» s'appliquerait plutôt à moi.
Interdiction du portable ? Mon cul !
Ma fille Anaïs a récemment exploité cet avantage technique de manière très astucieuse. Comme elle n'était pas rentrée à l'heure convenue pour la énième fois, j'ai fait l'erreur de lui annoncer l'interdiction de son portable par WhatsApp. Dès qu'elle est rentrée, j'ai confisqué son téléphone. En fait, j'aurais déjà dû remarquer à quel point elle m'a remis l'appareil sans résistance.
Le verdict a été de deux jours de privation de téléphone portable, l'appareil ayant été placé dans un coffre-fort en plastique spécialement prévu à cet effet, qui ne s'est rouvert qu'à la fin de la punition grâce à une minuterie. J'étais bien sûr le seul à avoir la clé de ce coffre.
Anaïs s'est aussitôt réfugiée dans sa chambre. Le deuxième jour, comme elle s'occupait très bien toute seule, j'ai commencé à me méfier. J'ai ouvert le coffre-fort, j'ai sorti le téléphone portable qui n'était plus alimenté et j'ai fait glisser le support de la carte sim à l'aide d'une aiguille.
Sim-salabim, la carte sim n'est pas dedans !
Et oui, le petit tiroir était vide, la carte sim avait disparu. J'ai presque eu un petit sourire en coin. Anaïs m'a froidement contrée et m'a rendue complètement idiote grâce à cette manœuvre intelligente. Pour en revenir à l'assignation à résidence, cette action est comparable à une fuite par la fenêtre, suivie d'une réintégration dans la maison sans que les parents ne le sachent.
C'est à ce moment-là que j'ai compris qu'Anaïs avait pu insérer facilement la carte Sim dans un autre téléphone portable (je ne sais pas où elle l'avait trouvée). Et c'est ce qui s'est passé ...
Normalement, je n'entre pas dans une pièce fermée. Ma décence me l'interdit. Mais cette fois, c'était différent. Sur la pointe des pieds, je me suis glissé devant la porte de sa chambre, j'ai frappé une fois brièvement et violemment et je suis entré rapidement. Anaïs était à plat ventre sur le lit, me regardait avec de grands yeux et se tournait brusquement sur le côté. Je venais de la voir cacher quelque chose sous la couette et il ne fallait pas être devin pour savoir ce que c'était. La manœuvre intelligente d'Anaïs a eu pour conséquence que l'interdiction du portable a recommencé.
Puis vint le coup numéro deux. Car ce que je ne savais pas non plus (et que j'ai dû apprendre de ma fille cadette Olivia) : Un iPod Touch est également compatible avec Internet et on peut facilement échanger des informations via les médias sociaux. Résultat : malgré le retrait du téléphone portable et de la carte Sim, Anaïs pouvait continuer à chatter sans que je le sache.
La prochaine étape de l'«assignation à résidence numérique» consistait à désactiver le wifi. L'iPod Touch a alors cessé de fonctionner et le calme est enfin revenu. Mais logiquement, sans wifi, l'accès à Internet avec mon ordinateur portable ne fonctionne malheureusement plus non plus. C'est ainsi que l'interdiction du portable s'est transformée en une «digital detox» forcée - qui nous a tous fait du bien ! La prochaine interdiction du portable peut venir ...
Au sujet de l'auteur :
Andreas B. habite dans l'agglomération d'une grande ville de Suisse alémanique, vit séparé depuis quatre ans et élève seul ses enfants. Ses filles adolescentes et leurs amis s'appellent en réalité autrement, mais nous voulons éviter que de futurs employeurs ne découvrent ces expériences de puberté sans fard. Il a par exemple déjà raconté leurs virées en cachette.
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