Monsieur Juul, pourquoi les disputes sont-elles importantes ?

A une époque où la parole parentale est devenue obsolète, il faut que les mères et les pères communiquent clairement leurs normes et leurs valeurs. Le thérapeute familial Jesper Juul révèle comment cela est possible et surtout quel est le bon moment pour le faire.

Monsieur Juul, autrefois, il y avait ce que l'on pourrait appeler le pouvoir parental. Ce que disaient le père et la mère était la loi. Les enfants respectaient, plus ou moins, des règles claires.

Oui - à l'époque où les règles fonctionnaient encore. Il y avait un consensus dans notre société en ce qui concerne les valeurs, et les mêmes règles régissaient la plupart des familles. Aujourd'hui, cette unité de règles et de valeurs n'existe plus, et la plupart des enfants n'ont pas peur des adultes.

C'est certainement une évolution positive. Mais qu'est-ce qui l'a remplacé ?

Tout d'abord, la conception du leadership parental n'a guère changé en plus d'un siècle. Elle s'est seulement modernisée et démocratisée, par exemple les parents donnent aujourd'hui plus de liberté à leurs enfants. Ce que nous souhaitons tous - y compris les enfants, d'ailleurs -, c'est que les valeurs que les parents et les écoles définissent comme bonnes pour la famille et ses membres soient respectées. Cela vaut également pour les limites personnelles définies par les parents. Pour y parvenir, il faut deux choses : des qualités de leader et des parents qui soient des modèles de confiance.

Jesper Juul est le thérapeute familial le plus célèbre d'Europe. Il est auteur de livres et père d'un fils adulte. Juul vit au Danemark. Il écrit régulièrement des chroniques de conseils pour le magazine suisse des parents Fritz Fränzi.
Jesper Juul est le thérapeute familial le plus célèbre d'Europe. Il est auteur de livres et père d'un fils adulte. Juul vit au Danemark. Il écrit régulièrement des chroniques de conseils pour le magazine suisse des parents Fritz+Fränzi.

Selon vous, quelles sont les erreurs les plus fréquentes commises par les parents lorsqu'ils entrent en conflit avec leurs enfants ?

De nombreux parents ne communiquent pas leurs valeurs suffisamment tôt et refusent ainsi aux enfants la possibilité de se sentir impliqués. Les parents ne prennent pas le temps de discuter des valeurs qu'ils souhaitent transmettre à leurs enfants et de la manière dont ils veulent les leur montrer et les leur montrer. Il est possible de prévenir ce genre de situation - mais pas pendant ou juste après un conflit : «Tu te souviens quand je me suis fâché parce que tu ne voulais pas ranger tes Legos ? J'y ai réfléchi et j'ai réalisé que nous ne t'avions jamais dit quel comportement nous trouvions important et juste dans notre famille. Tu n'es plus un bébé, et il est temps que tu fasses certaines choses toi-même et que tu nous aides parfois quand nous le demandons».

Quel est l'effet d'une telle déclaration sur mon enfant ?

Il oubliera certes le contenu exact de cette discussion, mais pas le sentiment d'être impliqué en tant que partenaire à part entière. Les parents peuvent ainsi établir des règles tout en définissant le ton sur lequel les conflits seront réglés à l'avenir. C'est la différence entre un leadership moderne et une culture de l'obéissance dépassée. Il n'y a rien à discuter sur la règle - tous les membres de la famille doivent contribuer au bien-être de la famille - mais la manière de vivre selon cette règle peut être négociée.

Peut-on se disputer «correctement» ?

Pour moi, cela signifie se disputer de manière à ne pas porter atteinte à l'intégrité personnelle de l'autre personne. C'est tout à fait possible. Mais vu la manière dont la plupart d'entre nous ont été élevés, cela demande beaucoup de pratique - même si c'est en fait très simple. Les messages à la première personne sont importants. Ainsi, un «Je déteste quand tu m'ignores» est mieux perçu par l'autre qu'un "Tu ne m'écoutes jamais !

«Celui qui enterre ses sentiments les enterre vivants. Ainsi, à l'intérieur, ils continuent à vivre de manière incontrôlable».

Jesper Juul

Or, nombreux sont ceux qui préfèrent éviter les disputes.

Cacher ses émotions ou être politiquement correct n'est pas la solution. L'autre ressent les émotions cachées, et c'est particulièrement dangereux chez les enfants, car ils sont livrés à leur imagination, qu'ils retournent toujours négativement contre eux-mêmes. Il faut en être conscient : Celui qui enterre ses sentiments les enterre vivants. Ils continuent ainsi à vivre à l'intérieur de manière incontrôlable. Cela ne joue aucun rôle dans les contacts sociaux qui ne sont pas très importants, mais cela joue d'autant plus dans les relations personnelles proches.


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