Monsieur Bauer, pourquoi les enfants réagissent-ils de manière agressive ?

Monsieur Bauer, comment définissez-vous l'agression ?

L'agression est un comportement qui vise à dire ou à infliger quelque chose à une autre personne, ce qui est vécu par cette dernière comme une confrontation, un désagrément ou une douleur.

Un certain potentiel d'agressivité est-il inné ?

L'agressivité est un programme comportemental inné auquel il est possible de faire appel. La capacité de pouvoir être agressif en cas de besoin est essentielle à la survie. Mais d'un point de vue neurobiologique, il n'existe pas ce que l'on appelle un instinct d'agression, c'est-à-dire une envie de violence physique ou psychique ancrée dans la biologie. L'agressivité et la peur sont des frères et sœurs - ils utilisent des systèmes neuronaux très similaires dans le cerveau. Personne ne parlerait d'un «instinct de peur» - c'est-à-dire d'un besoin de peur - simplement parce que presque tous les êtres humains font régulièrement l'expérience de la peur.

Mais si des personnes saines ont horreur de faire souffrir les autres, tout criminel est-il un psychopathe ? Et chaque enfant qui se bat a-t-il un problème psychique ?

Non, l'absence de pulsion d'agression ne signifie pas que les personnes saines ne font pas preuve d'agressivité. Une pulsion d'agression, telle que Sigmund Freud l'a imaginée, signifierait toutefois que le fait de faire du mal aux autres de temps en temps - sans aucune raison - ou de faire la guerre de temps en temps fait partie du programme normal des besoins des personnes tout à fait normales. Cette hypothèse est fausse. Toute agression a des raisons ...

Quand les enfants se comportent-ils de manière agressive ?

Chaque fois qu'un autre se met en travers du chemin. Par exemple, un enfant de 3 ans qui a un petit frère ou une petite sœur et qui détourne toute l'attention. Ou lorsque des ressources limitées sont distribuées, par exemple lorsqu'un gâteau est partagé ou lorsque tous ne peuvent pas avoir le même jouet attrayant. Lorsqu'un enfant est poussé ou frappé par un autre, des cycles d'agression se forment rapidement. Il en va de même entre les États qui ne parviennent pas à sortir des conflits.

L'agressivité est déclenchée par le fait de toucher le seuil neurobiologique de la douleur. Qu'est-ce que c'est exactement ?

Le déclencheur le plus sûr et le plus fiable de l'agressivité est l'infliction d'une douleur physique. Il n'y a même pas besoin d'un autre être humain pour cela. Regardez la colère qui monte chez les gens lorsque quelqu'un se coince méchamment le doigt dans une porte, sans aucune intervention extérieure ! Les centres de la douleur du cerveau ne sont pas seulement activés lorsque nous souffrons physiquement, mais aussi lorsque nous sommes socialement rejetés, exclus ou traités de manière injuste. Notre seuil de douleur est alors également atteint. L'endroit exact où se situe ce seuil est toutefois très individuel.

Chaque personne doit apprendre que ressentir des sentiments agressifs en soi et se comporter de manière agressive sont deux étapes.

Si l'agression est toujours une réaction à quelque chose, cela signifie-t-il que les agresseurs sont ou ont toujours été des victimes ?

Oui, mais cela n'excuse rien. L'évolution n'a pas seulement doté l'homme d'un appareil d'agression, mais aussi d'un cerveau frontal qui lui permet de s'observer et de se freiner lorsque la vie en société l'exige. Cette capacité, que nous acquérons par l'éducation, a été notre ticket gagnant de l'évolution. Sans éducation, le cerveau frontal ne peut pas entrer en fonction. L'éducation n'est donc pas une invention contre-biologique, mais fait partie de la destinée biologique de l'homme. L'homme doit apprendre que ressentir des sentiments agressifs en lui et se comporter de manière agressive sont deux étapes.

Pourquoi l'agressivité est-elle importante ?

Elle est indispensable pour signaler et réguler les perturbations dans le champ social. Pourquoi est-ce que je remarque que j'ai été traité de manière injuste ou irrespectueuse ? Non pas parce que je m'assois et que je calcule rationnellement, mais parce que, dans un premier temps, la colère ou la rage monte en moi. Ce n'est que dans un deuxième temps que nous commençons à réfléchir.

Pourquoi réagissons-nous de manière agressive non seulement à la douleur physique, mais aussi à l'exclusion sociale et à l'humiliation ?

La faute à l'évolution. Les deux sont potentiellement dangereux, que ce soit l'agression physique ou l'exclusion de la communauté. Nos ancêtres étaient en danger de mort même dans ce dernier cas.

Quel rôle jouent les médias, les jeux de ballons, les films et les armes jouets ?

Les enfants apprennent le plus de ce qu'ils voient, ils apprennent sur des modèles. Les jeux violents et autres offres où les enfants peuvent observer et expérimenter que la violence en vaut la peine ont une influence éducative dévastatrice.

Quelles sont les autres conditions qui favorisent l'agressivité chez l'enfant ?

Les bons liens interpersonnels élèvent le seuil de la douleur.Celui qui se sent bien entouré par sa famille ou ses amis ne se laisse pas facilement provoquer par les autres au quotidien. Le fait d'être bien relié à d'autres personnes active la libération de substances messagères qui atténuent l'agressivité. A l'inverse, le sentiment d'être exclu favorise l'agressivité, y compris chez les enfants.

Comment expliquez-vous le «Parent Battering», c'est-à-dire l'agression de l'enfant contre ses parents, d'un point de vue neurobiologique ?

Cela se produit surtout lorsque des liens fiables n'ont pas pu se créer entre les parents et les enfants, lorsque les parents étaient trop stressés ou trop préoccupés par eux-mêmes. Ou lorsque les enfants ont été victimes de violence de la part de leurs parents.

Les hommes commettent plus d'actes de violence que les femmes. Les garçons sont-ils plus agressifs
que les filles ?

Les garçons, lorsque l'agressivité monte en eux, dirigent davantage la violence vers l'extérieur. Les filles ont plutôt tendance à s'agresser elles-mêmes et à devenir dépressives ou à se blesser. Mais cela ne signifie pas que tous les garçons sont comme ça et toutes les filles comme ça. Les garçons ont plutôt tendance à agresser ouvertement lorsqu'ils sont en colère, les filles préfèrent exercer une violence dite relationnelle, c'est-à-dire qu'elles parlent par exemple en mal de la personne qui les énerve.

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