L'engagement : notre thème de l'été
Le nouveau numéro paraîtra le mardi 30 juin 2020. Vous pouvez le commander en ligne comme numéro individuel.
Chère lectrice, cher lecteur
Il est 20h20, le 25 mai 2020. Du sang s'écoule de la bouche de George Floyd. «I can't breathe. I can't breathe, man. Please». Un policier s'agenouille sur le cou de Floyd. «I can't breathe. I can't breathe» (je ne peux pas respirer). L'Afro-Américain répète la phrase 16 fois en l'espace de cinq minutes. Le genou reste à sa place. «Je vais monter dans la voiture», promet Floyd. Le genou continue d'appuyer sur son cou pendant 8 minutes et 46 secondes insupportables. Face à sa mort, Floyd appelle sa mère : «Maman. Maman». Puis il perd connaissance. Une heure plus tard, l'homme de 46 ans est déclaré mort à l'hôpital de Minneapolis.
Quelle mort horrible, quelle mort absurde.
Le fait que George Floyd ait appelé sa mère en pleine détresse m'émeut beaucoup. En travaillant sur ce numéro, j'ai souvent pensé à ce moment. L'appel à la mère est un appel à la sécurité et à la sûreté, à la fiabilité et au réconfort. Nous naissons tous avec le besoin d'être acceptés et aimés inconditionnellement. L'attachement est le nom de ce lien affectif puissant qui unit l'enfant et ses parents. Même si les pères jouent aujourd'hui un rôle tout aussi important dans le développement et l'éducation des enfants dans de nombreuses familles, la mère reste très souvent la principale figure d'attachement pour l'enfant. George Floyd s'en est sans doute souvenu instinctivement dans sa plus grande détresse.
«Il est temps que les parents expliquent à leurs enfants, dès leur plus jeune âge, que la beauté et la force résident dans la diversité».
Maya Angelou (1928-2014), écrivaine et militante américaine des droits civiques
Comment se crée l'attachement ? Comment les parents peuvent-ils établir un lien étroit et confiant avec leur enfant ? Et comment la relation évolue-t-elle au fil des ans ? Le dossier «L'attachement» de notre auteure principale Claudia Landolt répond à ces questions. Je vous le recommande vivement.
Le philosophe anglo-suisse Alain de Botton, que j'admire beaucoup, a récemment été interrogé par le «Süddeutsche Zeitung» sur la manière de gérer la crise de Corona. Les rédacteurs voulaient savoir ce que l'histoire nous enseignait. «Elle nous apprend que les hommes ont survécu à de nombreuses catastrophes et désastres naturels», a répondu de Botton. «L'histoire fait aussi de nous des grands-parents. Les parents sont constamment anxieux, se disent qu'il n'a pas assez d'amis, qu'elle ne sait toujours pas marcher. Et nos grands-parents ? Sont calmes et sereins. Pourquoi ? Parce qu'ils ont déjà vécu un peu plus loin. Nous devons tous devenir aussi sereins que nos grands-parents».
Quelle déclaration ! Elle correspond merveilleusement à notre interview mensuelle avec le sociologue François Höpflinger. Ma collègue Evelin Hartmann s'est entretenue avec lui de l'image que les grands-parents ont d'eux-mêmes et de leur relation avec leurs petits-enfants - et ce à deux reprises : une fois avant Corona et une fois après le lockdown. C'est passionnant !
Je vous souhaite beaucoup de plaisir avec ce numéro double, des journées d'été insouciantes et un cœur toujours léger.
Cordialement, Nik Niethammer