«J'ai fait quelque chose de mal, c'est pour ça que maman est triste».
Monsieur Kupferschmid, les enfants de parents psychiquement malades se reprochent souvent la maladie de leurs parents. Qu'est-ce qui permet de lutter contre le sentiment de culpabilité des enfants ?
Les enfants ont leur propre logique pour expliquer la maladie de leurs parents. L'idée classique est la suivante : J'ai fait quelque chose de mal, c'est pourquoi maman est triste. En expliquant la maladie psychique, les enfants peuvent se défaire de cette idée. Pour les enfants en âge préscolaire, il est judicieux d'utiliser des outils. Dans le livre «Le monstre de maman» (voir les conseils dans l'article «Quand maman est toujours triste»), c'est par exemple un monstre émotionnel qui est responsable de la dépression de maman. Il lui vole ses sentiments. De cette manière, les enfants peuvent se libérer de leurs sentiments de culpabilité. Mais il arrive aussi que les livres atteignent leurs limites. Il peut alors être utile que les parents et les enfants créent une métaphore commune. Une mère alcoolique et sa fillette de neuf ans ont par exemple utilisé l'image d'une bifurcation qui permet de sortir de la spirale descendante. Toutes deux ont pu s'y accrocher.
Qui parle aux enfants ?
Selon la situation, il peut s'agir de la mère qui souffre, d'un membre de la famille en bonne santé ou encore d'un spécialiste. Souvent, un entretien avec le médecin traitant du parent malade aide l'enfant à mieux cerner la maladie. La plupart des parents souhaitent toutefois parler eux-mêmes à leur enfant. Nous proposons une thérapie de groupe où les parents stressés peuvent s'exercer à de tels entretiens. Cette offre existe à Berne, à Winterthour et bientôt à Zurich. Les parents concernés se rencontrent six fois pour échanger leurs expériences.
Comment des personnes extérieures peuvent-elles aider si vous remarquez que l'enfant ne veut pas parler de la maladie de ses parents ?
Le service de conseil en éducation est un bon interlocuteur. Il existe également des groupes pour les enfants de parents souffrant de troubles psychiques, qui offrent aux enfants un espace pour parler de leurs problèmes familiaux. L'accent est toutefois mis sur les activités avec des enfants du même âge, car les enfants de parents souffrant de troubles psychiques sont souvent isolés. Les parrainages sont également utiles, car ils permettent aux enfants de découvrir la vie quotidienne normale. Par rapport à leurs amis de parents sains, les enfants de parents atteints de troubles psychiques vivent souvent une autre normalité.
Les enfants de parents atteints de troubles psychiques assument beaucoup de responsabilités à la maison. Combien de ces responsabilités un enfant peut-il supporter ?
La responsabilité est une ressource. Trop de responsabilités peuvent toutefois surcharger l'enfant. Si l'enfant assume une responsabilité inadaptée à son âge et à son développement, on parle de parentification. Il est par exemple inapproprié qu'un enfant de 9 ans soit seul responsable de tout le ménage ou qu'un enfant de 13 ans soit seul responsable de la prise de médicaments par son père. Les enfants surmenés ne peuvent pas franchir les étapes nécessaires à leur développement. Dans le quotidien clinique, nous observons souvent le phénomène de la parentification chez les parents isolés ou impuissants, par exemple lorsqu'ils souffrent de dépression ou d'une addiction. Souvent, on assiste également à une inversion de la hiérarchie : les enfants et les parents échangent leurs rôles. Au lieu de retirer complètement la responsabilité aux enfants, il peut être utile de la transférer à un autre domaine. L'enfant pourrait par exemple assumer une fonction dans le club de sport. Cela permet de développer les points forts au lieu de minimiser les déficits.
Comment puis-je reconnaître qu'un enfant de parents malades psychiquement est lui-même accablé ?
Les enfants réagissent différemment : certains deviennent agressifs et sauvages, d'autres silencieux et repliés sur eux-mêmes, d'autres encore très adaptés. Il n'existe pas de caractéristiques universelles. On sait toutefois qu'un stress psychologique chez le parent augmente la probabilité d'apparition de tous les problèmes psychologiques chez les enfants. C'est pourquoi la prévention est très importante. Or, notre système présente encore une lacune dans ce domaine : L'assurance maladie paie les traitements. Pour la prévention, en revanche, ce sont souvent les fondations ou les parents eux-mêmes qui doivent intervenir. Pourtant, la prévention ne profite pas seulement à l'enfant et aux parents, elle est également plus rentable à long terme pour l'État.
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- Quand maman est toujours triste. Une histoire sur les enfants de parents psychiquement malades , ce que la maladie leur fait et pourquoi il est si important de les impliquer davantage dans la thérapie de leurs parents.