Combien coûte un enfant ?

Plusieurs études ont montré à quel point la progéniture pèse sur le budget des ménages. Les résultats montrent également qu'en Suisse, les familles ne sont que peu soutenues en comparaison européenne.

La famille est un pilier central de la société. C'est simple : sans enfants, notre société s'éteint. Et s'il est important de se préoccuper des pensions, il est tout aussi important de réfléchir à la politique familiale. Il faut se pencher sur la question du coût d'un enfant et des aides que les familles reçoivent des autorités ou des entreprises.

Il convient de distinguer les coûts directs sous forme de frais supplémentaires - primes d'assurance maladie, frais d'alimentation, etc. Ces derniers résultent d'une réduction ou d'une interruption de l'activité professionnelle au profit des enfants et entraînent une perte de revenu ou une baisse de revenu.

En Suisse, l'État intervient financièrement pour couvrir une partie de ces coûts : Les deux moyens pour y parvenir sont les allocations familiales et les déductions fiscales. D'autres s'y ajoutent, dont les contributions de la Confédération pour réduire les coûts de la garde externe des enfants ou les réductions de primes des caisses maladie pour les enfants et les jeunes. Dans certains cantons (Genève, Tessin, Soleure, Jura et Vaud), il existe également des prestations complémentaires pour les familles qui, contrairement aux allocations familiales, ne sont versées qu'aux familles disposant de moyens financiers limités.

Chez nous, un enfant coûte environ 1500 francs par mois

Sur mandat de Pro Familia Suisse, Joseph Deiss, Marie-Luce Guillaume et Ambros Lüthi ont été les premiers, en 1988, à tenter de mesurer ce que coûte un enfant. Ils ont cherché à savoir quel revenu supplémentaire était nécessaire à une famille avec enfants pour atteindre le même niveau de vie économique qu'un couple sans enfant. Les auteurs de l'étude sont arrivés à la conclusion qu'un couple avec un enfant devrait avoir un revenu supérieur de 24 % à celui d'un couple sans enfant. Pour un couple avec deux enfants, ce chiffre est de 43 pour cent, et pour un couple avec trois enfants, il est de 60 pour cent.

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En 1995 est parue l'étude du Bureau d'études de politique du travail et de politique sociale, ou BASS. Elle a ouvert une nouvelle dimension à l'étude des coûts des enfants en introduisant la notion de coûts indirects. Il s'agit des coûts qui résultent de la réduction de l'activité professionnelle, principalement de la mère, après la naissance d'un enfant. En effet, après la naissance d'un enfant, la grande majorité des femmes décident de réduire leur temps de travail ou d'interrompre leur activité professionnelle pendant une certaine période.
Outre la perte de revenu, une interruption constitue également un obstacle à l'évolution professionnelle et à la formation continue ; là encore, ce sont surtout les femmes qui sont actuellement concernées. En 2016, la moitié des femmes ayant des enfants de moins de 12 ans soit ne travaillait pas, soit travaillait à un taux réduit de moins de 50 %.

Suite à l'étude BASS, l'Office fédéral des assurances sociales a chargé la même entreprise de réaliser une étude approfondie dans laquelle les coûts directs et indirects ont été complétés par deux nouvelles variables : une estimation sur une plus longue période et une différenciation de ces coûts par catégorie de revenu. Le tableau suivant présente les coûts directs et indirects pour les enfants sur la base d'un revenu moyen et sur une période de 20 ans :

Coûts directs et indirects pour les enfants sur la base d'un revenu moyen et sur une période de 20 ans.
Coûts directs et indirects pour les enfants sur la base d'un revenu moyen et sur une période de 20 ans.

Extrapolés à l'ensemble de la population, les coûts indirects s'élèvent à plusieurs milliards de francs. Notre économie doit renoncer dans une large mesure à une main-d'œuvre qualifiée, ce qui lui fait perdre une somme énorme - de l'argent qui manque parce que les conditions-cadres permettant de concilier vie professionnelle et vie familiale ne sont pas réunies.

En 2009, BASS et l'Université de Berne ont établi un nouveau calcul du coût des enfants. Le contexte avait considérablement changé depuis l'étude BASS : D'un côté, l'allongement de la durée des études a entraîné une hausse des coûts et les dépenses pour la garde des enfants ont augmenté. D'autre part, la participation croissante des mères au marché du travail a réduit les coûts indirects.

Seul un sixième des coûts est compensé

Les chercheurs se sont notamment penchés sur la question de savoir comment et dans quelle mesure les autorités compensent le montant que les familles doivent dépenser en plus. Selon les études, ce montant s'élève à 47 milliards de francs, composé de coûts directs et indirects.
Résultat : seul un sixième de ce montant est compensé. Et ce de manière très inégale en ce qui concerne les coûts directs et indirects : les allocations familiales, les prestations complémentaires pour les parents, les bourses et les déductions fiscales pour les frais de garde des enfants permettent de compenser 6,22 des 22 milliards de francs de coûts directs, soit un bon quart. Les coûts indirects ne sont pratiquement pas compensés (1,1 milliard sur 25 milliards). Un faible montant est compensé par des bonifications pour tâches éducatives dans le cadre de l'AVS ou par l'encouragement des crèches.
Dans la plupart des pays européens, les pouvoirs publics participent beaucoup plus pour soulager les familles. Une réduction de l'activité professionnelle n'entraîne pas seulement une baisse de revenu, mais a également pour conséquence un déficit des assurances sociales, par exemple en matière de prévoyance vieillesse professionnelle, où l'absence de cotisations - notamment en cas de divorce - entraîne des pertes considérables.

Si nous voulons soutenir les familles et réduire le risque de pauvreté, il estindispensable de créer des conditions favorables à la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale et d'augmenter les prestations de soutien aux familles. Pour cela, il faut des prestations financières ciblées pour les personnes dont les ressources sont limitées, afin qu'elles ne deviennent pas dépendantes de l'aide sociale.
Image : Adobe Stock


Vers l'auteur :

Philippe Gnaegi, Dr., ist Ökonom, Direktor von Pro Familia Schweiz und arbeitet als Dozent an der Uni Freiburg. Er ist verheiratet und Vater von drei erwachsenen Kindern.
Philippe Gnaegi, Dr., est économiste, directeur de Pro Familia Suisse et travaille comme chargé de cours à l'Université de Fribourg. Il est marié et père de trois enfants adultes.

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