«Quand on est père célibataire, il faut avoir la peau dure».

Monsieur Schneider, il n'a jamais été question que vos fils vivent principalement avec vous après la séparation ?

Lorsque nos enfants sont nés, nous avions déjà décidé que nous ne nous disputerions jamais la garde. Comme nous aimons tous les deux être mère et père, que nous pouvons nous permettre la charge financière supplémentaire de deux ménages et que la vie commune avec nos enfants est une très grande priorité pour nous deux, il a toujours été hors de question que nous partagions à moitié la garde et l'autorité.

En Suisse, après une séparation des parents, la majorité des enfants vivent encore avec leur mère. A quoi tient le fait que les pères assument si peu de responsabilités ? Ne veulent-ils pas, ne peuvent-ils pas ou ne sont-ils pas autorisés à le faire ?

C'est sans doute en premier lieu parce qu'avant la séparation, la plupart des couples choisissaient un modèle plutôt classique, dans lequel le père travaille plus que la mère, et qu'ils le conservent ainsi par la suite - notamment pour garantir la sécurité financière. Mais il est certainement vrai aussi que de nombreux hommes ont du respect pour cette tâche et se sentent dépassés. Ils se concentrent volontiers sur le rôle de soutien de famille. Mais il faut aussi dire qu'en tant qu'homme, on ne nous encourage pas à assumer davantage de responsabilités.
de vouloir prendre en charge les enfants. Lors d'une séparation, on est au mieux regardé de travers lorsqu'on dit vouloir réduire son temps de travail, et au pire on n'est pas pris au sérieux - même par les autorités.

Depuis 2014, l'autorité parentale conjointe est la règle en cas de séparation. Les choses ont-elles évolué depuis lors pour les pères ?

Pas dans la vie quotidienne, seulement dans la tête des gens - mais c'est déjà un début.

Pour quelles raisons les enfants restent-ils chez leur père ?

Pour les mêmes raisons que celles pour lesquelles ils restent avec la mère. Selon moi, l'essentiel est de savoir quel parent est le mieux placé pour s'occuper des enfants et les garder. Les enfants ont besoin de stabilité, de soins et d'un environnement sûr. Si l'un des parents a par exemple une maladie chronique, des difficultés financières ou est fortement absorbé par son travail, cela peut être difficile en ce qui concerne la garde des enfants.

Les hommes doivent apparemment se battre davantage que les femmes pour obtenir la garde de leurs enfants.

Si la mère et le père sont d'accord pour que la garde soit confiée au père, cela ne pose pas de problème. En cas de litige, la situation est souvent différente.

Garde : «Il faut absolument éviter que l'enfant doive décider sous la pression».

Les souhaits des enfants y sont-ils pris en compte ?

Les enfants sont interrogés eux-mêmes le plus tôt possible. Mais en fin de compte, c'est le tribunal qui décide quelle forme de garde et d'autorité est appliquée - l'âge des enfants jouant certainement un rôle. Les enfants plus âgés sont plus à même d'exprimer ce qu'ils souhaitent.

Les enfants se retrouvent dans un conflit intérieur lorsqu'ils doivent se prononcer sur la personne avec laquelle ils souhaitent vivre. Comment se comporter en tant que parent dans une telle situation ?

Cela peut représenter un grand défi et parfois même un surmenage pour toutes les personnes concernées. Il faut absolument éviter que l'enfant doive décider sous la pression. Les parents devraient parler le plus souvent possible avec l'enfant du changement à venir et, si nécessaire, collaborer avec un service spécialisé.

Comment les mères réagissent-elles lorsque les enfants expriment leur volonté de rester avec le père ?

Tout comme un père dont les enfants souhaitent rester avec leur mère. Les pères ne tombent pas enceintes, n'accouchent pas et n'allaitent pas. Mais la différence entre être père et être mère s'arrête là. Je pense que chaque parent est mis à contribution dans cette situation, qu'il décide lui-même ou par le biais d'une décision extérieure avec qui l'enfant vivra. Une séparation et un divorce sont une chose. Ne plus voir son enfant - ou ne plus le voir régulièrement - est une autre chose beaucoup plus grave. Il faut accepter la décision de l'enfant et maintenir le contact dans la mesure du possible.

Il y a des pères qui aimeraient avoir leurs enfants plus souvent avec eux, mais pour une raison ou une autre, cela ne fonctionne pas. Souvent, dans de tels cas, la communication entre les parents est également perturbée. Que conseillez-vous à ces hommes ?

En tant que père, on doit s'expliquer si l'on veut assumer la responsabilité de personne qui s'occupe des enfants après une séparation : pourquoi veut-on plus de responsabilités pour les enfants, veut-on vraiment travailler moins ? Une mère n'a pas à le faire. Il est difficile de sortir de ce mode de justification. Il faut en tout cas chercher du soutien et utiliser les offres de conseil.

«Les enfants doivent pouvoir avoir une relation équivalente avec leurs deux parents après une séparation».

Les pères qui s'occupent principalement de leurs enfants doivent supporter beaucoup de choses, des regards obliques à l'hostilité ouverte. Comment y faire face ?

Je peux donc parler de mon expérience : Une fois, une femme a voulu me retirer mon fils des bras parce qu'elle trouvait bizarre que je sois seule avec lui à la piscine le matin. Elle m'a demandé à plusieurs reprises à quelle heure la mère du garçon arrivait et a apparemment trouvé irritant que je lui dise que la mère était au travail. Un père qui assume la responsabilité principale de ses enfants a besoin d'avoir la peau dure, mais aussi d'échanger avec des personnes partageant les mêmes idées. Cela aide.

Combien de temps pensez-vous qu'il faudra encore pour que les pères et les mères soient vraiment égaux en Suisse dans le travail et la famille ?

Jusqu'à ce que les enfants qui grandissent actuellement dans des familles où les parents se partagent les responsabilités - qu'ils soient séparés ou non - arrivent dans les instances où les décisions correspondantes sont prises. L'égalité est le thème d'une génération, et il faudra une génération pour que les choses changent, au niveau idéologique et politique. Il se peut alors qu'à l'avenir, davantage d'enfants vivent avec leur père qu'aujourd'hui. Mais je voudrais souligner que l'objectif devrait être que les enfants puissent avoir une relation équivalente avec leurs deux parents après une séparation.

A propos de la personne

Christoph Adrian Schneider est psychologue et possède son propre cabinet à Berne. Il est membre du comité directeur de männer.ch. L'organisation faîtière des pères et des services pour hommes de Suisse soutient les hommes dans tous les domaines et s'engage également au niveau politique pour l'égalité des deux sexes. Schneider est divorcé et partage l'autorité parentale sur ses deux fils, âgés de 7 et 8 ans, ainsi que leur garde avec la mère des garçons.

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